L’autre jour je discutais avec une de mes collègues nullipare. Elle me parlait d’une amie à elle, toute jeune maman.
Ma copine et son bébé, ça a l’air de bien se passer, mais quand même je suis un peu inquiète. Le bébé a tété au moins trois fois quand on était ensemble. Et comme il tète aussi beaucoup la nuit, elle veut le garder dans sa chambre. Je lui ai dit que c’était une super mauvaise idée, parce que ça risquait de tuer leur couple.
Des propos tout bêtes que j’aurais pu tenir il y a à peine quelques mois, mais qui aujourd’hui me frappent de plein fouet tant ils me semblent problématiques. Tant d’horreurs et de contre-vérités ont été enfoncées dans nos têtes à propos des bébés…
En devenant maman, je me suis souvenue que nous n’étions rien de plus que des animaux. Un nourrisson n’est qu’un petit mammifère qui lutte pour sa survie. Aucun de ses gestes, aucune de ses demandes n’est superflue. En grandissant, il développe des compétences qui lui permettent d’exprimer plus clairement ce dont il a besoin. Il reste cependant un petit être dépendant de nous pour survivre. Notre job de parent, c’est de subvenir à ces besoins, chaque fois qu’ils se manifestent. Et ses besoins sont finalement assez simples : manger, se sentir en sécurité, et évoluer dans un environnement stimulant juste ce qu’il faut. Sauf que le bébé a son rythme de petit animal, dicté par la biologie. Et que ce rythme n’est en rien compatible avec nos vies d’adultes, où on dort la nuit pour mieux travailler le jour. C’est en observant ma fille, et en me documentant sur la physiologie des tous petits que j’ai réalisé qu’on nous sert des salades sur le développement des enfants depuis des années, dans le but ultime de nous remettre le plus vite possible sur les rails du travail. C’est qu’une jeune mère ou un jeune père en congé parental, à part créer de la dette, il ne fait finalement pas grand-chose. Et c’est tout à fait ce que reflètent les propos innocents de ma collègue.
Le but à demi-caché de ce qui à mon sens est une campagne massive de désinformation est d’en faire des petits êtres dociles, qui nous laissent pioncer suffisamment longtemps la nuit pour qu’on ait pas l’air de sortir du casting de The walking dead. Un dressage savamment orchestré par des pédiatres hyper médiatisés mais cons comme des valises sans poignée (Marcel Rufo, si tu nous écoutes – ne lisez pas cet article si vous avez l’âme sensible, il m’a donné envie de me brûler la rétine). Il faudrait que nos gosses dorment 12 h par nuit et 8 h par jour dès 3 mois, et dans leur chambre sans aucune intervention parentale. Il faudrait qu’ils mangent à heure fixe (et s’ils pouvaient eux-mêmes faire leurs biberons et les laver ensuite ce serait vachement sympa). Et s’ils sont au sein, il ne faudrait pas qu’ils y restent plus de six mois grand max, et qu’ils ne tètent pas plus de 15 minutes toutes les quatre heures montre en main. Ah, et j’oubliais, mon injonction préférée : nous, parents, nous devons apprendre à nos enfants à ne pas pleurer. Pour ce faire, il nous est recommandé de laisser nos chiards s’époumoner dans leur lit, jusqu’à ce qu’ils comprennent qu’en fait, ça ne sert à rien. Mais pas longtemps hein, juste quelques minutes, on est pas des chiens (à ceci près que les chiennes ne laissent pas leurs chiots pleurer, elles).
Vous n’en êtes pas capable ? Vous êtes un mauvais parent, vos enfants vous dévoreront tout cru pendant votre sommeil.
On ne m’avait pas prévenue, mais la toute petite créature aux yeux brillants qu’on a déposés sur mon ventre épuisé un matin de mars n’est pas seulement l’amour de ma vie.
C’est aussi mon pire ennemi. Un troll qui n’aura de cesse de briser mon couple en s’imposant dans le lit conjugal et en tirant sur mes seins comme une forcenée, quitte à les déformer, de hurler jour et nuit dans l’unique but de tester mes limites et celles de mes tympans, de demander de l’attention et de la tendresse simplement pour exercer sa tyrannie. En faisant le choix de la prendre dans mes bras dès qu’elle le réclame, de la mettre dans notre lit quand elle ne se sent pas en sécurité dans le sien, de la porter contre moi chaque fois que j’en ai l’occasion, de continuer à lui donner le sein, avec la ferme intention de poursuivre aussi longtemps qu’on y trouvera notre compte toutes les deux, de ne jamais la laisser pleurer, c’est comme si j’élevais la réincarnation de Kim Jong Un. C’est quand même dingue de vivre dans une société qui te dit qu’en écoutant les besoins de tes enfants et en y répondant avec tendresse et bienveillance tu risques d’en faire des tueurs en série. Tout ça parce qu’on a oublié une chose essentielle : ce n’est pas aux bébés de s’adapter à notre absurde vie d’adulte, mais bien à nous de nous mettre à la hauteur de nos enfants. Combler leurs besoins et être à l’écoute de leur rythme, même s’il n’a rien à voir avec le nôtre et qu’il nous épuise, ne fera pas d’eux des monstres. Je suis prête à parier, sur la tête de ma fille, que ce sera même l’inverse.
Je profite de cet article pour vous partager mes deux lectures de jeune maman préférées. Bon, ok, ce sont les deux seuls livres que j’ai eu la force de terminer. Mais ils m’ont tout deux été d’une aide précieuse.
Serre-moi fort, de Carols Gonzales, mon guide ultime (même s’il a quelques relents sexistes parfois, et qu’il peut être culpabilisant pour les mères qui n’allaitent pas)
Comment éviter de se fâcher avec la terre entière en devenant parent ? : la parentalité en 9 questions qui divisent, de Beatrice Kammerer, et notamment le chapitre sur l’autonomie.
[…] conclure, je vous invite à lire cet excellent post d’@AlmiraGulsh nos bébés, ces […]
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